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vendredi, 17 novembre 2006

cinquante-deux (lorsque l’idiot pointe la lune, le sage serre les fesses)

Sans aller jusqu’à vouloir les passer au peloton d’exécution, j’ai du mal à accepter sereinement que les espèces de neuro-déficients qui viennent raconter bave aux lèvres leur vie minable dans Confessions intimes, par exemple, aient le même droit de vote que moi. Eh ! bien sûr je suis contre la peine de mort, mais aussi pas vraiment pour le suffrage universel direct. Même pour moi je veux dire. Que tout le monde s’exprime par les urnes, c’est bien, c’est essentiel. Mais je m’inquiète du fait qu’à force de ne pas connaître nos institutions, à ne rien biter aux discours et aux intentions de nos dirigeants, à leurs bilans, à ne pas suffisamment faire l’effort de réfléchir intelligemment à la question politique, on en vient à élire non plus celui qui sera le plus talentueux, le plus efficace, le plus légitime, mais le plus populaire. La popularité, c’est du vent… C’est loin quand même d’être un signe de qualité.

On dirait pourtant bien que c’est devenu le nouveau mode de scrutin, celui que tout le monde attendait, celui dans lequel chacun peut se reconnaître et se fondre. Elections Présidentielles ou Star Academy, même combat ! Alors quand une fille, qui se reconnaîtra peut-être, m’envoie un mail pour me proposer de participer à une sorte de concours littéraire sur le net, et même si je suis sincèrement surpris et flatté qu’elle ait pensé à moi, je ne peux que rester perplexe. Au moment même où j’officialise en quelque sorte ma prise de distance d’avec le lectorat, il s’agirait en fait de te demander, à toi qui lis ces lignes, de voter pour ma candidature, afin de lui offrir la chance, que dis-je, le privilège, l’insigne honneur ! d’être examinée par quelques scribes assermentés. Deux notes à peine, et pas des plus enjouées, publiées au mois d’octobre et jusqu’à maintenant, plus de Constance, plus d’histoires de cul, un humour en berne, des jérémiades au contraire à n’en plus finir, un style toujours plus verbeux ; c’est quasiment du suicide textuel. Et malgré tout, je m’en irais, moi, à la chasse au bulletin ? Il me faudrait alors subitement devenir un spécialiste des relations publiques, spammer au maximum tous mes contacts, repeindre les pages de mon journal d’incitations au clic, et faire ainsi ma promo, en clamant à qui veut l’entendre, et avec le sourire encore ! que je suis bien le meilleur ? que c’est moi qu’il faut élire ? Sans oublier bien entendu d’édulcorer généreusement mon propos… Parce que, c’est bien connu, le public – l’électorat - aime la variète. Ce qui est facilement accessible, un peu sucré, un peu rose. Confessions intimes, en somme. Il ne veut rien qui soit amer, le public. Rien qui soit parfois un peu sombre, un peu violent, un peu trop radical. Il veut rire et être heureux. Il veut être diverti.

C’est pas dans le vide de ces pages qu’il va trouver beaucoup matière à divertissement, hein. Et c’est pas pour lui faire plaisir ou gagner je ne sais quel prix formidable que je risque de changer quoi que ce soit. Et pourtant… Oui, bien sûr, il y a un pourtant, et là j’espère que la fille en question aura lu jusqu’ici. Pourtant, donc, je n’écrirais pas une ligne si j’étais mon seul lecteur. Je n’ai cessé de le répéter : ce qui me force, me pousse, me motive à creuser davantage, à labourer ma bile sans cesse, à passer des heures sur mon clavier pour ne finalement publier que le millième de mes mots, c’est l’espoir d’être lu chaque jour un peu plus que le précédent. Le concept du journal intime, cadenassé et caché sous son oreiller, très peu pour moi. Ca ne me soulagerait pas. J’ai besoin d’écrire à tous ce que je ne dis à personne. Besoin de ce cynisme à la Diogène, besoin de me branler généreusement sur la place publique, et que tout le monde en profite. Pardon si ça paraît prétentieux. Mais je ne suis pas sûr qu’il s’agisse d’un désir de reconnaissance ; il me semble au contraire que jamais mon but en ouvrant ce journal n’a été de me faire aimer de tous, ni même de quiconque… j’aurais l’impression justement de faire de la variète. Mais toucher le plus grand nombre, en bien, en mal, en doux ou en amer, et provoquer la réserve ou le dégoût, l’adhésion ou le dédain, oui, cent fois oui. C’est un désir de visibilité que j’exprime. Une volonté d’existence.

Vu comme ça, l’histoire du concours prend tout son sens... Mais non. Je n’y participerai pas. Pourquoi ? Les raisons susdites pèsent déjà lourd dans la balance. Mais c’est sans compter le fait que je suis mauvais perdant… Que l’échec me ferait ruminer pendant des semaines… Que je préfère, en somme, me draper dans une espèce de recul vaguement hautain, et tenter de croire à ma feinte fierté d’indépendant, plutôt que d’affronter le risque, aussi minime, aussi ridicule soit-il, d’une désillusion. Je ne l’ai pas raconté ici jusqu’à présent, mais il y a de cela quelques semaines, je suis tombé sur une occasion, miraculeuse et unique, de quitter mon statut plus que branlant de free lance pour un contrat bien au chaud, dans une petite boîte tout à fait à mon goût. Equipe jeune, visibilité d’un travail que je maîtrise parfaitement, salaire très correct et surtout, stable. Adieu, monde pourri du cinéma ! En enfer, le travail au black, pour les potes, pour des entreprises qui ne paient jamais ! Bonjour, la vie de salarié ! Je m’y voyais déjà. Quand on m’a annoncé que je n’étais pas pris, on m’a juré que ce n’était pas la qualité de mon book qui était en cause... J’ai compris alors que mes craintes d’avoir été médiocre à l’entretien étaient parfaitement justifiées. J’avais raison de croire que je m’étais mal vendu. Pas assez accessible, pas assez sucré, pas assez rose. Pas sympathique. La lucidité était revenue, et au lieu de travailler sur ce point-là, dans cette voie-là, au lieu de creuser les raisons de mon échec, d’essayer de repartir sur de nouvelles bases, de m’améliorer, d’apprendre à aller vers les autres, j’ai eu un geste de dédain, j’ai haussé la tête et je me suis renfrogné de plus belle dans les affres de mon quotidien, jurant en moi-même qu’on ne m’y reprendrait plus à avoir comme ça un peu d’espoir.

Laissons le soleil se lever de lui-même. Bon gré mal gré, et même si c’est de moins en moins rond, le monde tourne, quoi qu’on y fasse. C’est ça mon caractère. C’est ça mon idée, ma seule idée. Moi je resterai dans mon coin, sans faire de vague, sans faire tomber la foudre. Je laisserai les témoins de Confessions intimes voter aux Présidentielles pour le candidat le plus séduisant à leurs yeux bigleux, et les internautes cliquer pour les textes qui auront le plus de verve, de saveur, d’humour, pour les notes les plus sympathiques - et tant pis s’ils oublient que la sympathie est loin d’être une qualité, mais juste la première étape du processus d’enculade. Tant pis pour la visibilité. Tant pis pour les attentes. Je ne prends pas de risque, en restant ainsi à l’écart, n’est-ce pas ? Je suis frileux, peureux peut-être. Quoi ! Ai-je jamais dit autre chose dans ces pages ?

Commentaires

Tiens c'est marrant que tu choisisses aujourd'hui pour publier une nouvelle note...
Ce matin, je me baladais sur ton blog, relisant quelques vieilles notes au hasard et regrettant cette longue absence. Et je pensais quel talent! Que tu ne veuilles pas participer à un concours, je peux comprendre mais je ne suis pas d'accord sur le fait que pour participer, il faille édulcorer son propos, changer pour plaire, je citerai pour exemple un blog qui a beaucoup de succès et qui pourtant n'a rien de sucré, ni même d'édulcoré, le blog de Folie privée. Un exemple parmi d'autres.
Le public ou du moins un certain public sait reconnaitre la qualité, aime lire des choses violentes ou qui l'interroge ou encore qui lui ressemble, dans son immense complexité. Bien sûr on est loin de TF1 et de confessions intimes cela va de soi.
Que dire de plus à part que te lire me manque et que je ne pense pas être la seule dans ce cas...
A bientôt, I hope
bises

Écrit par : libellul | vendredi, 17 novembre 2006

Tiens, c'est la deuxième fois en peu de temps que j'entends parler de Folie privée, ça concernait le concours justement. Faudrait vraiment que j'aille y faire un tour un de ces quatre... Merci pour ton passage, Libe !

Écrit par : Thomas | vendredi, 17 novembre 2006

En + tu n'as pas à te justifier, c'est toi qui fais comme tu veux, hein ! (pourvu que tu continues d'écrire pour nous, qui ne sommes pas le jury de je-sais-pas-quoi, pense-t-elle égoïstement...)

Écrit par : Mimi | dimanche, 19 novembre 2006

Excellent! excellent!
Cette note est tellement bien faite ; es-tu satisfait, toi?
j'aimerais savoir comment tu considères cette dernière note.
Je pense que t'as raison de ne pas participer à ce concours ; je n'aimerais pas te lire sur un blog-jeu-concours plein de publicités défilant et clignotant en haut et en bas-de page... t'as bien raison!
"P'tain" c'est pas grave pour le boulot stable, t'en as perdu un, mais tu en trouveras un autre et tu seras prêt la prochaine fois!
Jette ta télé, tu verras 6 mois après on se sent bien... On est forcément tentés de regarder des conneries attristantes, des émissions "pornographiques" (comme confessions intimes)... alors il faut la jeter!
Bon dimanche, bonne écriture!
à très vite!
sophia-sofu

Écrit par : sofu-sofu | dimanche, 19 novembre 2006

Thomas Mossian, j'aime cet article.



Voila.

Écrit par : Marielle | lundi, 20 novembre 2006

Rien à dire !
Bisou !

Écrit par : Moon | mardi, 21 novembre 2006

Mimi : et bravo pour cette nouvelle adresse :)

Sofu : Comment je considère cette note ? Sais pas, mais à partir du moment où je tolère sa publication, c'est que je ne la crois pas totalement mauvaise. Je suis de plus en plus difficile, c'est l'horreur !... Pour le boulot... ce genre d'annonce est très rare. En même temps j'ai toujours galéré pour tout, j'aurais trouvé ça bizarre, voire louche, que ça devienne facile d'un seul coup, comme ça paf. Enfin, la téloche, j'ai récupéré celle de Constance, et j'adore. Ca cisèle l'esprit critique !

Marielle et Moon, merci, même si je regrette que vous n'ayez rien de plus à dire ;) Marielle, si tu es bien la copine du Vernis rouge comme je le crois, je te présente mes hommages.

Écrit par : Thomas | mardi, 21 novembre 2006

Si je ne devais te dire qu'une chose cette chose commencerait par un infinitif : ne changer rien jamais surtout.

bILL*JAKE

Écrit par : Bill Jake | mardi, 21 novembre 2006

Et s'il fallait persister je signerais.

Écrit par : Bill Jake | mardi, 21 novembre 2006

Mr Thomas Mossian enchanté...

Je crois qu'après lecture de ce billet, nous sommes fait pour nous entendre...

Bien à vous

Écrit par : Nina k | mardi, 21 novembre 2006

Bravo, excellent !! enfin quelqu'un qui ose et qui le dit tout haut: j'aime les concours !

Euh, j'ai pas tout compris ? C'était ma minute blonde ... :)

laurent
http://blog.laurent.eu.org

Écrit par : laurent | mardi, 21 novembre 2006

@ Thomas : comme à l'accoutumée une belle note bien pensée trés honnete, juste, dure et forte ... moi je te trouve sympathique en tout cas ... ;-)

Écrit par : Mini Fée | mercredi, 22 novembre 2006

Bill Jake : tiens, il semblerait que nous ayons des connaissances en commun...

Nina K : mais je ne demande que ça, moi, de m'entendre avec les gens !

Laurent : tu rigoles, mais j'ai déjà des remords ;)

La Fée : on se demande où tu veux en venir toi !!! Ravi de voir que les contacts de la première heure sont encore fidèles. Après les suicides de Brige, de Soph et d'Ana, mes rollmops tirent la tronche...

Écrit par : Thomas | mercredi, 22 novembre 2006

mais on s'en tappe du concours, c'est du coubertin, juste du :
allez j'suis cap de dire venez me lire.
vas t'inscrire.
et lis les archives de Folie.
des bises monsieur qui a du talent.

Écrit par : cécile | jeudi, 23 novembre 2006

Des connaissances en commun ?
Ah oui, qui ? (pedia ? (gniarf gniarf))

Écrit par : Bill Jake | jeudi, 23 novembre 2006

Cecile : "toujours plus haut, plus vite, plus fort" ? (pas sûr de l'ordre) Ah non ! "l'important c'est de participer" ! Mouais... Mais le "venez me lire" en effet j'adhère. Merci, on va y réfléchir.

Bill Jake : j'en dis pas plus ;)

Écrit par : Thomas | jeudi, 23 novembre 2006

Conseil a noté,J'aurais tout de meme plusieurs commentaires à ajouter.

Écrit par : poker gratuit sans telechargement | mercredi, 14 septembre 2011

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